Chapitre 13: Episode sous-marin

 

L’eau se mit à l’entraîner de plus en plus vite entre les parois nacrées, comme si ce cauchemar allait bientôt se terminer. Encore un dernier virage, et Clémence émergea enfin de ce maudit tunnel. Elle atterrit sur Elaïjah. Elle se releva sur le sol sableux d’une grotte hors d’eau, le regarda droit dans les yeux.  Ses joues restaient bizarrement gonflées, et soudain, elle cracha sur le beau visage de son ancêtre, toute l’eau ou presque qu’elle avait gardée précieusement dans sa bouche. Elle lui avait volontairement réservé cet extra.

Ce dernier, le visage ruisselant, s’excusa auprès de la jeune fille énervée, mais elle lui relança son ultime filet d’eau, avant de lui dire, d’un ton calme et doux : « J’accepterai tes excuses, grand-père, quand tu m’auras dit où sont les monstres ? – Je suis là, sœurette ! Tu m’as manquée, tu sais. »

Clémentine s’empressa d’embrasser sa sœur, qui se mit à sangloter. Elle aussi réagissait mal à cette terrible épreuve du tunnel interminable. « Ne t’inquiète pas, dit Elaïjah, je leur avais donné un tube spécial pour qu’ils puissent respirer. – Et il ne t’est pas venu à l’idée de m’en donner un ? – Désolé, ma chè… »

Il ne put terminer sa phrase, qu’une voix perçante vint interrompre, et soudain il se retrouva une nouvelle fois au sol, écrasé par Ayana. Il voulut l’aider à se relever, mais elle le gifla. « Non mais tu es fou ? Tu veux nous tuer, mon amour ? Avant de te renouveler mes vœux, je crois que je vais prendre le temps d’apprendre à te connaître… » conclut-elle, très grande dame. « Mais non, mon cœur, je… »

Il fut encore interrompu, cette fois-ci par l’arrivée d’un étrange paquet d’algues, qui bougeait tout seul. Quelque chose voulait en sortir : c’était Léo.

Une fois dépêtré, il hurla : « Ouahou, c’est trop mortel, on le refait quand ? S’il te plait, Elaïjah, on peut refaire un tour ? – Ah bien voilà quelqu’un qui sait m’apprécier, je crois que je vais plutôt rester avec lui… » affirma Elaïjah.

Ayana le rattrapa et lui prit le bras : « Dis-nous d’abord où on est ? – Nous sommes… »

A croire qu’il était maudit, une nouvelle fois Elaïjah ne put finir sa phrase. Une douce voix, mais incroyablement prenante, vint l’interrompre. Lui et Léo, bercés par cette symphonie, se rapprochèrent d’une végétation de coraux roses et bleus qui croissait au centre la grotte. Léo s’y faufila, et aperçut, un peu plus loin, un petit fleuve. Tous le suivirent, car le fredonnement venait de là-bas. Ayana voulut atteindre la berge mais elle glissa sur un rocher et tomba à l’eau. Elaïjah s’empressa de lui venir en aide, tandis que la belle voix se rapprochait peu à peu.

Et soudain, Léo hurla : « Attention, derrière vous ! » Il se dépêcha de se cacher auprès de Clémence. Celle-ci vit une apaisante lumière bleue, qui semblait virevolter au-dessus des eaux, accompagnant la voix mystérieuse. Une longue et élégante queue de poisson surgit de l’eau, la lumière merveilleusement bleue arrêta de scintiller, et la voix se tut. Seules résonnaient les gouttes d’eau qui tombaient dans le fleuve.

« C’est quand qu’on part ? » chuchota Clémentine en saisissant la main de sa grande sœur.

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Et soudain, émergea le visage d’une ravissante jeune femme, les yeux noirs pétillants et les cheveux bleus étincelants. Son visage était parfait. Elaïjah se rapprocha de cette beauté, qui lui jeta les bras autour du cou, sous le regard enflammé d’Ayana et la mine stupéfaite des enfants et de Clémence. « Excusez-moi les amis, s’expliqua le marin, je vous présente Ylaïs. C’est une très bonne connaissance, et l’une des filles du roi des sirènes. – Bonsoir jeunes gens ? Vous ici ? Racontez-moi tout !  Je me promenais quand j’entendis une sorte de gros caillou tomber à l’eau. – Le gros caillou c’était moi je suppose, intervint Ayana, un peu sur les nerfs. – Ma douce, tu es un joyau ! s’indigna Elaïjah. Et les joyaux ont le droit de créer des arc-en-ciel en chutant dans les rivières. – Que c’est joliment dit ! Cette charmante femme est ton épouse, je suppose ? Celle que tu as cherchée si longtemps ? »

Elaïjah devinant Ayana encore angoissée la présenta, ainsi que les enfants. Il expliqua la situation dans laquelle ils se trouvaient, sans trop de détails.

Après avoir salué tout le monde, Ylaïs prit la parole :

« Elaïjah nous sauva, moi et mon peuple, à maintes reprises, et en particulier ma chère sœur… De toute façon, les amis de notre ami sont nos amis… Attendez-moi. »

La belle créature plongea soudainement. Elle revint quelques instants plus tard, portant un coffret en bois. Lorsqu’elle l’ouvrit, on vit cinq bulles très étranges enfermées dedans. On aurait cru que ces bulles respiraient, car elles bougeaient comme si elles inspiraient l’air et le rejetaient ensuite. Ylaïs expliqua que ces bulles leur permettraient de respirer sous l’eau. Ils devraient les avaler. Mais cette magie ne fonctionnerait que pour une année terrestre, ce qui signifiait une semaine dans ce royaume.

Elaïjah rassura ses amis et leur dit qu’ils étaient juste de passage, et ne resteraient qu’un jour ou deux. Chacun avala sa bulle et plongea. 

Texte: Iva Caruso, Image: Source : dida.centerblog.net sur centerblog.