Depuis une heure déjà
Se mélangent l'encre et le sang.
Ils donnent sens à la douleur
La douleur vive de la piqûre,
Toujours la même, identique
Comme au début.
Le temps ne fait rien à l'affaire, ça, tu le savais déjà.
Deux gars sont là, dans une chambre
Grandis trop vite, dans des immeubles
Qui sonnent creux quand on s'en va.
Des pas résonnent
En peu de mots, beaucoup d'alcool
La décision a été prise.
L'aiguille trace la ligne courbe
Et pareille à celle de la boussole
De l'avion qui passe au-dessus
De la mer Méditerranée,
Elle hésite et puis s'affole,
Dans le trou noir où ils sont bercés.
On entend juste le bruit des moteurs dans la brume
Et le bruit du frigidaire dans la nuit.
La cocarde qu'ils tracent sur la peau de l'un
Est imprimé sur le corps de l'avion de l'autre
Celui qui vole comme un géant au-dessus d'eux.
Il porte en lui tous les prestiges
De la Royal Air Force
Même initiales que Rien à Faire
La même étoffe que le héros qui les hante
Ils veulent se la coudre à même la peau,
Pour imprimer avec, le courage à la peau
Directement
Pour la sauver comme dans un rite
Comme les stigmates du Sauveur
Se prémunir dans les trous d'air
Ouvrir un espace
Dans leurs corps
Ouvrir leurs corps aux grands espaces
Dans l'air instable et les turbulences
De l'inaction qui désarrime
Des basses pressions qui les écrasent,
Au passage étroit et dangereux auxquels ils se sont suspendus
Comme des funambules inutiles
Ce qui les fait mourir.
Mais tout s'inverse comme dans un miroir
Le cercle rouge vire au bleu ciel
Un morceau de Petit Prince
S'en est allé avec Antoine
Abattu en plein vol
Entre le Mont Blanc et l'Algérie.
Comme eux fauché à ras du sol…